Erotique-Lancinante (2018)

La graine dont a émergé Erotique-Lancinante est double : à la fois André Breton, dont la phrase « la beauté convulsive sera érotique-voilée, explosante-fixe, magique-circonstancielle, ou ne sera pas » (Amour fou, 1937), revenait sans cesse, onirique et lancinante, dans l’esprit de Ledoux, et La Charmeuse de serpents d’Henri Rousseau (1907), dont le décor, à l’orée de la jungle, met en avant une flûtiste où riment exotisme et érotisme. Ainsi, au premier plan sonore, on retrouvera la flûte dont les sons soufflés, idiomatiques de la flûte japonaise, participent du caractère exotique de la fresque. Ledoux avait exploité cette technique dans son concerto pour shakuhachi, parente en bambou de la flûte à bec, signé deux ans plus tôt.
Personnage principal et narrateur, la flûte se transforme au fil des mesures : tantôt sarbacane, tantôt objet de désir. Tribale, la clarinette basse rugit, tandis que le piano égraine des piaillements, accompagné des caresses du violoncelle. Par moments, on croit entendre les grognements des singes et autres bêtes qui se camouflent dans l’obscurité des feuillages. Le tout se mêle finalement dans une texture envoûtante, impalpable, laissant émerger les évocations les plus folles.
L’Ensemble Fractales, à qui est dédiée l’œuvre, l’a créé à Saint-Pétersbourg en 2018. 
(Christophe Bitar)