Noise-conducted Emissions (2024)

Noise-conducted Emissions prend racine dans la faille technique, là où s’arrête le mouvement académique des machines et où démarre l’erreur de fonctionnement. Helga Arias invite l'auditeur dans un monde où « les frontières entre le signal et le bruit, la création et la perturbation, le contrôle et l'abandon disparaissent, révélant la musicalité intrinsèque d'un phénomène qui passe généralement inaperçu en arrière-plan. » En effet, ce qui était alors un défaut devient une source d’inspiration artistique. Derrière cela se profile l’opposition entre deux textures distinctes, l’une délicate (flûtée, quasi-soufflée) et l’autre extrêmement dense et intense, qui reprend l’idée d’énergie continue d’un signal (défectueux ou non). Elle mime aussi la synthèse même du son électronique, qui, dans le transfert du matériau brut au résultat artificiel, est déviée par du bruit qui limite la prédictibilité du processus car il « tord » les sons qu’il est censé imiter.
La partition fait la part belle aux extended techniques, les modes de jeu non conventionnels qui évoquent « les bourdonnements et les interruptions des interférences électromagnétiques, brouillant les frontières entre l'intention humaine et l'accident technologique. » Sons multi-phoniques du saxophone, jeu estremo sul ponticello au violoncelle, cliquetis de clefs ou touches à moitié enfoncées à l’accordéon, balle magique ou plaque de métal dans le piano, tous les moyens sont bons pour parvenir à une torsion du son.
Texte : Christophe Bitar