Cris (1999)

Guerres, carnages, massacres, génocides, viols collectifs, nettoyage — ou purification — ethnique, pogroms, exactions, terrorisme, attentats (à la bombe, à la voiture piégée), meurtres au nom de l'intégrisme, guérillas, déportations, tortures, exécutions, crimes contre l’humanité, populations entières parquées dans des camps, extermination, concentration, abandon, mort, visages pétrifiés de douleur, images insoutenables de désespoir et de désolation — inlassablement vomies par les  télévisions du monde tandis que les bandes-son retransmettent l'écho d'une ahurissante polyphonie dans laquelle, des quatre coins de la terre, hurlements, prières, plaintes, pleurs, sanglots, gémissements, lamentations, supplications sans fin semblent s'unir, en choeur, dans un délire inconcevable de voix détruites, lointaines et proches à la fois. Cris est né de la confrontation à cette réalité, et plus précisément du massacre de Srebrenica.
L'œuvre est conçue comme un long monologue du soliste, d'où toute idée concertante est absente. Les quatre groupes d'instruments jouent ici  le rôle de résonateurs naturels du piano, ou alors ils sont écrits de manière à tisser des arrière-plans. Seule la flûte basse, amplifiée,  sorte de voix incantatoire, émerge parfois, comme une plainte lointaine et désolée.
A travers les quatre segments qui la composent (Cris / lntermezzo / Litanies / Résurgences) et qui se jouent sans interruption, j'ai tenté de transcrire les résonances profondes que font naître en moi ces souffrances indicibles. (William Blank)